Pour accompagner sa transition énergétique, l’Afrique mise entre autres sur la biomasse. Et après le cacao ou le café, c’est le coton qui pourrait prochainement révéler tout son potentiel. Une trentaine de professionnels africains de la filière se sont ainsi récemment rendus en Inde, où des solutions de valorisation existent déjà.
Les déchets issus de l’industrie cotonnière pourraient-ils être transformés en énergie verte ? L’idée semble en tout cas intéresser au plus haut point les producteurs africains. Une trentaine d’entre eux, originaires de Tanzanie, d’Ouganda et du Zimbabwe, se sont rendus récemment en Inde, afin d’étudier des filières de valorisation en biomasse. Ils y ont été accueillis par l’équipe de l’Institut central de recherche sur le coton (ICRC), situé à Nagpur, dans le centre du pays. Le voyage avait été organisé par la Conférence des Nations-Unies sur le commerce et le développement (Cnuced), qui soutient par ailleurs les programmes d’électrification de l’Afrique.

En Inde, la délégation africaine a pu constater les avancées réalisées par l’ICRC. Au lieu d’être brûlés -processus sans valorisation, et qui dégage brutalement une très grande quantité de fumées-, les résidus y sont transformés en pellets ou en briquettes. Dans le pays, 500 briqueteries ont déjà vu le jour. Le gouvernement a même annoncé vouloir doubler les capacités du pays dans le secteur de la biomasse, pour atteindre 10GW installés d’ici 2022. Une ambition que les tiges, feuilles et graines de coton, autrefois considérées comme des déchets, contribueront à atteindre. D’autant qu’en début de chaîne, à raison de trois tonnes de déchets par hectare cultivé, et avec un prix d’achat de dix dollars la tonne (selon des chiffres d’une étude de la Cnuced), les profits potentiels sont loin d’être négligeables pour les producteurs de coton. Rien que pour la Zambie, on les estime à trois millions de dollars par an.
Diversifier les revenus
Cette nouvelle source de revenus pourrait faire du bien à toute la filière cotonnière africaine, qui représente près de 10 % de la production mondiale. Lors de la campagne 2018/2019, c’est le Bénin qui s’est imposé comme le premier producteur de coton africain (700 000 t), suivi du Mali (660 000 t), de la Côte d’Ivoire (460 000 t), et du Burkina Faso, qui termine au pied du podium (440 000 tonnes). Mais s’il est réputé pour sa qualité, le coton « made in Africa » est actuellement très éprouvé par la concurrence. « Le coton africain a le gros avantage d’être récolté à la main, ce qui préserve mieux les caractéristiques de la fibre », expliquait dernièrement Gérald Estur, spécialiste du coton, à l’occasion de la 77e réunion plénière du Comité consultatif international du coton (ICAC). « En Afrique, le secteur du coton n’a pas la chance de bénéficier des soutiens extrêmement importants que peuvent lui accorder les autres pays, notamment les principaux producteurs que sont la Chine et les États-Unis ».

En clair, les producteurs africains doivent, la plupart du temps, se débrouiller sans la moindre subvention, ce qui les pénalise sur le marché mondial. En valorisant leurs résidus, ils pourraient ainsi sensiblement diversifier et améliorer leurs revenus. D’autant qu’une autre filière est également explorée, celle de la production de combustible à partir d’huile de coton. Considérées comme un coproduit de la fibre (qui représente 85 % de la valeur marchande du coton), les graines sont depuis longtemps utilisées pour fabriquer de l’huile alimentaire. Mais il est également possible de distiller cette huile pour en faire du bioéthanol. Cette technologie prometteuse se heurte pour l’instant aux quantités relativement limitées de graines disponibles pour une production à grande échelle.

https://afrique.latribune.fr