Le processus d’instauration d’une zone de libre-échange continentale africaine (Zlecaf) a été au centre des échanges des chefs d’Etat à l’occasion du 31e sommet de l’Union africaine (UA) qui clos ses travaux ce 2 juillet à Nouakchott. Selon le rapport d’étape présenté par le président nigérien, le processus est bien avancé et 5 nouveaux pays ont rejoint les 44 autres ayant déjà signé l’accord parmi lesquels l’Afrique du sud. Si l’Afrique du sud a émargé, ce n’est pas encore le cas pour le Nigéria toujours réticent à ouvrir son gigantesque marché, ce qui pourrait compromettre l’effectivité du marché commun à l’horizon 2019.

Mahamadou Issoufou a déjà une échéance toute fixée et pour laquelle il compte sur ses pairs pour accélérer le processus : en juillet prochain pour le 33e sommet ordinaire de l’UA qui est prévue pour se tenir à Niamey, la zone de libre-échange continentale (Zlecaf) doit être effective. En termes clair, d’ici 2019, il faut qu’au moins 22 pays aient ratifié l’accord dans le sillage de la signature du texte, approuvé le 21 mars dernier à l’occasion du dernier sommet extraordinaire de Kigali. Pour le président nigérien, c’est un défi de taille mais à portée de main d’autant que 5 nouveaux pays se sont joints au 44 pays signataires dès le départ de l’accord portant instauration d’un marché commun, le plus grand à l’échelle mondial et qui contribuera à favoriser l’intégration africaine et accélérer le développement du continent.

Parmi les nouveaux signataires enregistrés ce dimanche 1er juillet dans la capitale mauritanienne, la Sierra Leone, la Namibie, le Lesotho, le Burundi et surtout une grosse prise, l’Afrique du Sud. C’est le président Cyril Ramaphosa en personne qui a paraphé le document à Nouakchott, une bonne nouvelle pour la ZLECAF puisqu’ils sont désormais 49 pays à se joindre à l’accord. Le processus est donc bien en marche comme l’a mis en exergue le leader du processus, le président Mahamadou Issoufou qui a présenté son rapport d’étape en plénière à l’occasion de la première journée de la Conférence des chefs d’Etat.

« Je peux vous rassurer que le processus de ratification est sur la bonne voie » a fait part à ses homologues le chef d’Etat nigérien qui a souligné que d’ores et déjà, le Kenya et le Ghana ont été les premiers à déposer simultanément leurs instruments de ratification depuis le 10 mai 2018. Le Rwanda a aussi déposé ses instruments de ratification le 27 mai et a été le premier à déposer les instruments de ratification du Protocole sur la libre circulation des personnes alors que le Niger a déposé ses instruments de ratification le 8 juin 2018.

Des ratifications encore nécessaires pour l’entrée en vigueur de la Zlecaf

En plus des six pays qui ont déjà ratifiés le texte, deux nouveaux pays, l’Eswatini (ex-Swaziland) et le Tchad ont profité du sommet de Nouakchott pour déposer leurs instruments de ratification. Au total donc, 8 pays ont franchi le pas alors qu’il faudrait 22 ratifications pour l’entrée en vigueur de l’accord. Ce que l’UA espère atteindre d’ici fin 2019 et pour le reste des pays signataires d’ici mars 2019 pour engager véritablement le processus. En ce sens le président de l’UA, le chef d’Etat rwandais Paul Kagamé, tout comme le président de la Commission de l’UA, Moussa Mahamat-Faki, se sont joint au président nigérien pour plaider auprès des autres pays encore réticents, à se greffer à la dynamique continentale.

« Nous avons dépassé, depuis le 21 mars 2018, le point de non-retour en ce qui concerne ce grand rêve de l’Afrique. Ce qui nous reste à faire, c’est d’avancer vite et bien. Par conséquent, battons-nous avec confiance, n’ayons pas peur de prendre des risques si nécessaire et créons la dynamique qui nous permettra d’accroître le commerce intra-africain, de parvenir à l’industrialisation, de créer plus de perspectives d’emploi pour nos populations, notamment les jeunes, ainsi que d’instaurer la paix et la sécurité durables fondées sur la prospérité continentale » a plaidé de nouveau Mahamadou Issoufou.

Réticences et inquiétudes

Dans son rapport, le leader en charge du processus a fait part de certaines discussions qui achoppent encore sur la liste des produits et services qui seront les premiers à être libéralisés mais dans l’ensemble, la dynamique se poursuit. Plusieurs initiatives sont d’ailleurs prévues d’ici la fin de l’année pour accorder les violents des différents pays mais au delà de ces considérations technique, l’enjeu pour l’UA est de voir tous les pays du continent signer d’abord le traité et par la suite le ratifier.

Car si malgré les 49 pays signataires enregistrés en quelques mois, certains et pas des moindre manquent à l’appel. C’est le cas du Nigéria qui rechigne encore à le faire, une tache sombre au tableau au regard du poids du pays dans l’économie africaine. Malgré l’optimisme du président Issoufou qui espère voir dans cette phase, des inquiétudes légitimes qui seront atténuées d’ici peu de temps, l’absence du Nigéria risque de compromettre l’entrée en vigueur effective de la Zlecaf. Bien que présent dans la capitale mauritanienne, le président Muhammadu Buhari est resté sur sa lancée, celle de ne pas s’engager en attendant la fin des consultations avec le secteur privé nigérian, très réticent à l’ouverture de son marché.

« L’accord est en bonne voie pour entrer en vigueur » a aussi constaté Paul Kagamé qui a invité les autres pays qui n’ont pas encore signé de le faire « C’est à partir de ce moment, que l’Afrique pourra nécessairement s’engager avec ses partenaires en tant que bloc ». Le chef de l’Etat rwandais n’a pas manqué de souligner que c’est dans ce contexte, « d’une Afrique qui parle d’une seule voix » qu’intervient le renouvellement des relations entre le continent et l’Union européenne (UE). C’est aussi ce qu’a plaidé le président nigérien, un appel à peine voilée pour les pays qui ont ou sont en train de négocier unilatéralement des accords commerciaux bilatéraux avec d’autres partenaires ou groupes économiques. « Bien que chaque État membre de l’UA ait le droit souverain de conclure de tels accords, j’estime que ces derniers ne devraient pas compromettre le grand projet de création et de fonctionnement de la ZLECAf » a souligné Mahamadou Issoufou avant de rappeler qu’à l’occasion de plusieurs forums, « nous nous sommes engagés à parler d’une seule voix et à travailler ensemble ».
(Source : https://afrique.latribune.fr)