L’AGOA, l’accord qui ouvre les portes à l’exportation de 6300 produits africains vers les Etats-Unis, libres de toute taxe, vient d’achever son 18e forum à Abidjan. Lors de la rencontre qui a réuni des représentants d’une trentaine de pays africains et américains, les intervenants ont passé en revue les opportunités ouvertes par l’accord. Mais quelques mesures seraient nécessaires pour en faire un moteur de développement des exportations africaines vers les Etats-Unis, qui n’hésitent pas à se servir de l’accord pour défendre leurs intérêts commerciaux sur le Continent. Le Rwanda en a fait l’expérience.
A la capitale ivoirienne, les Etats-Unis ont appelé 39 pays africains jugés éligibles à exporter sans taxes vers les Etats dans le cadre l’AGOA à améliorer leur niveau des exportations. Les opportunités ouvertes à ces pays ont été revues et mises à jour lors du 18e Forum ministériel de l’AGOA clôturé le 6 août à Abidjan. L’AGOA, l’African Growth and Opportunities Act ou la loi sur la croissance et les opportunités en Afrique, lancée en 2000 par les États-Unis permet aux produits des pays africains répondant à des critères précis d’accéder au marché américain sans barrières douanières et tarifaires. Les critères d’éligibilité sont relatifs aux efforts dans la lutte contre la corruption notamment, au respect des droits de l’homme et au libéralisme économique. Au total, l’accord autorise 6300 produits africains à accéder au marché américain, permettant aux pays africains de mieux intégrer le commerce mondial où le Continent ne représente que 3% des échanges.
En dépit des facilités offertes par l’AGOA, l’Afrique n’exporte pas plus de 2% sur le marché américain et ne représente que 0,8% des importations américaines. Selon le vice-secrétaire des États-Unis pour l’Afrique au Département d’État, Matthew Harrington, qui s’est exprimé le 4 août lors du Forum de la société civile, en marge du Forum ministériel de l’AGOA, les Etats-Unis cherchent à renforcer leurs liens avec l’Afrique pour soutenir les initiatives bilatérales, la croissance et un environnement des affaires propice.
Quelques préalables au développement des exportations africaines vers les Etats-Unis
Cependant, pour exporter il faut d’abord produire, transformer, mettre en place un réseau de grandes entreprises et de PME, capables d’exporter en ciblant des niches bien précises aux Etats-Unis. Les pays africains se trouvent dans l’incapacité de tirer profit de l’AGOA sans le développement d’un solide secteur industriel, des infrastructures et d’une logistique pour faciliter les exportations. Un travail à réaliser en amont que l’ensemble des Etats africains à quelques exceptions près tardent à accomplir. En dépit ce handicap, certaines opportunités ouvertes par l’AGOA ont été saisies par des pays, notamment d’Afrique de l’Est dont le Rwanda, l’Ouganda, le Kenya et la Tanzanie.
Du Côté américain, l’accord peut être utilisé en cas de menace des intérêts des Etats-Unis. L’on se souvient en 2018, lorsqu’en réponse au relèvement des droits d’exportations de vêtements et de chaussures de seconde main (friperies) au Rwanda, Donald Trump avait décidé de suspendre les avantages commerciaux dont bénéficient des produits importés du pays est-africain.
L’AGOA, pour maintenir le lucratif commerce de friperie en Afrique
Tout est parti de la décision l’an dernier du Rwanda et ses voisins la Tanzanie et l’Ouganda d’interdire l’importation de friperie de vêtements et de chaussure qui, selon eux, ruinent leurs industries locales de textile. Le Rwanda est passé à l’acte, multipliant par 20 le taux des douanes sur ces produits. La nouvelle a été mal reçue du côté américain, notamment chez les professionnels américains, principaux fournisseurs.
L’Association américaine des matériaux et des textiles recyclés est alors montée au créneau. Alertées, les autorités allaient vite lancé un examen pour déterminer l’admissibilité des trois pays à conserver les avantages garantis par de la Loi fédérale américaine sur le développement et les opportunités africaines (AGOA) qui offre des facilités d’entrée sur le marché américain aux pays africains entreprenant des réformes économiques et de gouvernance. C’est alors que Trump décide de suspendre les avantages commerciaux dont bénéficient les vêtements importés du pays est-africain, qui par cette décision voulait d’abord et surtout protéger et développer son industrie naissante de textile.
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