Par Marie Camara
Le 9 mars dernier, l’Institut Américain des
Consommateurs (American
Consumer Institute) a publié un rapport
sur les cigarettes
électroniques (e-cigarettes) et la santé
publique. Ce rapport s’ajoute à
la longue liste d’études qui indiquent que
l’e-cigarette est moins
nocive que la cigarette conventionnelle
(combustible), malgré les
controverses.
La mission affichée de cette organisation non
gouvernementale est de «
promouvoir le bien-être économique en améliorant
la compréhension et
l’impact des politiques publiques et des
régulations sur les
consommateurs dans un contexte de libre marché
». Leur rapport, intitulé
«La réglementation sur les cigarettes
électroniques met-elle en danger
la santé publique? Examen des preuves et
faux-pas politiques » met en
lumière les idées, souvent contestées, répandues
sur les e-cigarettes,
et souligne leur potentiel inexploité pour
atténuer les dommages causés
par le tabac combustible.
La cigarette conventionnelle tue chaque année
plus de 8 millions de
personnes dans le monde selon l’Organisation
Mondiale de la Santé.
Depuis quelques années, les e-cigarettes
connaissent une popularité
grandissante et leur impact sur la santé
publique provoque des débats
animés. Plusieurs controverses sont, en effet, à
noter. L’une des plus
récentes concerne un rétropédalage de la revue
Journal of American Heart
Association (JAHA) dans laquelle deux chercheurs
avaient affirmé que
l’e-cigarette était un facteur de risque accru
de crise cardiaque. Suite
à plusieurs protestations sur le bien-fondé de
leurs recherches et une
contre-expertise, la revue s’est rétractée.
En 2015, le Département de Santé Publique en
Angleterre (Public Health
England) affirmait que le risque de maladies
diminuait de 95% avec la
cigarette électronique. Les toxines contenues
dans les e-cigarettes
seraient, généralement, 100 à 1000 fois moins
présentes que dans les
cigarettes combustibles.
Par ailleurs, il a également été démontré que
ces alternatives au tabac
combustible constituaient les aides au sevrage
les plus courantes et les
plus efficaces à la disposition des fumeurs. En
février 2019, une étude
publiée dans la revue New England Journal of Medicine,
démontrait que
l’e-cigarette allait jusqu’à soutenir les
fumeurs qui souhaitent arrêter
totalement de fumer. 900 fumeurs candidats à
l’arrêt total du tabac ont
été suivis.
Durant quatre semaines, la moitié d’entre eux
ont utilisé les
e-cigarettes et l’autre moitié a disposé des
thérapies classiques de
remplacement de la nicotine (gommes et pastilles
notamment). Un an plus
tard, il a été noté que 18% de ceux qui avaient
utilisé l’e-cigarette
avaient arrêté de fumer, contre 9% parmi ceux
qui avaient utilisé les
thérapies de remplacement de la nicotine.
Malgré les preuves scientifiques, l’argument
principal martelé par les
détracteurs de la cigarette électronique est
qu’elle est dangereuse pour
les jeunes et que son attractivité (arômes
sucrés, choix variés,
packaging attrayant notamment) en fait des
proies faciles. En première
ligne, l’Organisation Mondiale de la Santé qui
met en avant la
protection des jeunes populations pour justifier
une prise de position à
l’encontre de l’e-cigarette. L’autorité américaine
de réglementation des
denrées alimentaires et des médicaments (la
FDA), quant à elle, va
jusqu’à parler d’épidémie de vapotage qui
pousserait les jeunes à
basculer vers le tabac ensuite. Un grand nombre
de taxes et de
régulations restrictives ont, de ce fait, été
mises en place.
Des millions de personnes dans le monde
utilisent les e-cigarettes et
pourtant le cadre législatif semble inadapté.
Les études scientifiques
prouvant une nocivité moindre par rapport au
tabac combustible
s’accumulent, dans le même temps les
interdictions, restrictions et
taxations pleuvent. La FDA a mis en place des
mesures qui forcent les
vendeurs à soumettre au préalable une demande
d’autorisation de vente
(Premarket Tobacco Application). Par ailleurs,
l’Etat du New Jersey est
en passe de mettre un terme à la vente
d’e-cigarettes d’ici avril 2020
et l’Etat du Massachussets a voté une loi pour
la mise en place d’une
taxe de 75% sur les ventes.
Pourtant, le rapport de l’Institut Américain des
Consommateurs insiste
: «Certaines preuves empiriques indiquent que le
vapotage par des
mineurs ou des non-fumeurs est peu fréquent ».
Et d’ajouter « la réalité
est plus nuancée. Les e-cigarettes sont bien
moins nocives que les
cigarettes combustibles et constituent un des
moyens les plus utilisés
et efficaces dans le cadre d’un arrêt total du
tabac ».
Nombreux sont ceux qui appellent les
législateurs et régulateurs à
positionner l’e-cigarette dans le cadre une
stratégie globale de
réduction de la nocivité. Pour l’Institut
Américain des Consommateurs, «
ils doivent déterminer quelles politiques sont
les plus appropriées pour
protéger la population tout en encourageant les
fumeurs à envisager
l’e-cigarette comme une alternative plus saine
». Le danger, indique le
rapport, ne se situe pas dans le produit, mais
dans des décisions
inadaptées et « des restrictions trop zélées ou
mal conçues sur le
vapotage, combinées à des informations
trompeuses sur les véritables
risques pour la santé qui dissuadent les fumeurs
de rechercher une
alternative potentiellement vitale.»
En Afrique, la cigarette électronique ne
constitue pas un phénomène
répandu et fait face à de nombreuses
interdictions et taxations,
notamment au Kenya, au Rwanda, en Tanzanie et
plus récemment au Ghana et
en Afrique du sud. Néanmoins, le continent
devrait également être
concerné par ce débat de spécialistes car la
vente des nouveaux produits
du tabac prend malgré tout de l’ampleur,
notamment sur internet.
Tous s’accordent néanmoins sur ce point :
l’arrêt pur et simple de la
cigarette est le moyen le plus sûr de se
prémunir de maladies graves.
