Le Rapport 2020 sur les flux financiers illicites et le développement durable en Afrique de la conférence des Nations-Unies sur le commerce et le développement (Cnuced), révèle que le rôle particulier du commerce de l’or en tant que vecteur de flux financiers illicites.

 « Les propriétés physiques, la grande valeur pour un faible poids et la négociabilité de l’or font que son commerce international présente un risque élevé de servir de vecteur à des réseaux criminels organisés pour blanchir de l’argent (Financial Action Task Force, 2015) et pour la contrebande. La Suisse raffine de 40 % à 70 % de la production mondiale d’or. Après affinage on ne peut tracer l’origine de cet or vendu comme originaire de Suisse sur le marché international », explique-t-on dans le rapport.

D’après le rapport, Collier  a mis en lumière les coûts économiques et développementaux considérables des conflits ; dans le contexte africain les conflits sont en lien étroit avec l’extraction et le commerce illicites de minéraux.

L’or parmi les causes de conflits dans de nombreux pays

« Il est établi que l’or, l’étain, le tantale et le tungstène ont nourri des conflits dans de nombreux pays. Ce phénomène a été pris en considération dans la section 1552 de la loi Dodd-Frank sur la réforme de Wall Street et la protection des consommateurs (loi Dodd-Frank), ainsi que par l’Union européenne qui a adopté un règlement spécial relatif à l’approvisionnement en de tels produits (European Commission, 2017) », souligne le rapport.

D’après le rapport,  selon certaines estimations, sur la période 1997-2010 les hausses de prix exogènes (super-cycles des marchés des matières premières) expliquent jusqu’à hauteur d’un quart le niveau moyen de violence dans les pays africains.

Toujours d’après la source, le Groupe d’experts des Nations Unies sur l’exploitation illégale des ressources naturelles et autres richesses de la République démocratique du Congo (United Nations, Security Council, 2002) a constaté que les plus grandes sociétés de commerce d’or de Kampala, Machanga Ltd et Uganda Commercial Impex, achetaient de l’or à des groupes armés non étatiques basés en Ituri.

Et le rapport de renseigner : « Un comité établi en application de la résolution 1533 (2004) du Conseil de sécurité de l’ONU a mis en place un régime de sanctions sur le commerce de l’or avec cette région (résolution 1596 (2005) du Conseil de sécurité). Il a été mis en évidence que de l’or extrait en République démocratique du Congo passe en contrebande en Ouganda puis est exporté vers les Émirats arabes unis (Reuters, 2019 ; United Nations, Security Council, 2002) ».

Absence de comptabilité dans les exportations de l’or des pays africains

« Une grande partie du commerce de l’or n’est pas comptabilisée dans les statistiques des exportations des pays africains et les pays dans lesquels l’or est extrait subissent un manque à gagner fiscal considérable. Les exportations d’or de l’Ouganda ont fortement augmenté ces dernières années, alors que ce pays n’est doté que de modestes ressources en or. Les importations d’or en provenance d’Ouganda que déclarent les Émirats arabes unis sont de beaucoup supérieures aux exportations d’or vers les Émirats arabes unis que déclare l’Ouganda, ce qui s’explique par la sous-facturation à l’exportation et la contrebande », souligne le rapport.

Écart  élevé des pays africains  à l’exportation pour l’or

D’après le rapport, les données miroir du commerce bilatéral d’autres pays africains se caractérisent elles aussi par un écart positif élevé à l’exportation pour l’or (par ordre décroissant : Afrique du Sud, Togo, Bénin, République-Unie de Tanzanie, Mali, Burundi, Madagascar, Sénégal et Kenya). Et cet écart est corrélé au prix de l’or sur les marchés internationaux.

« On constate une forte corrélation positive (0,85) pour l’or et une forte corrélation négative (-0,68) pour le pétrole. Cette corrélation entre prix et écart entre les données miroir à l’exportation s’explique en partie par le fait que les deux sont liés à la valeur des exportations totales  (si les prix augmentent, la valeur des exportations totales augmente, de même que l’écart miroir à l’exportation). L’influence des différentes modalités de commerce et des risques associés à diverses marchandises est ainsi mise en évidence, de même que le risque élevé de sorties illicites liées à l’or », renseigne-t-on dans le rapport.