Le gestionnaire de fonds d’investissement dédiés au continent africain, Amethis, signe son entrée dans le capital du groupe industriel sénégalais Nouvelle minoterie africaine (NMA) de feu Ameth Amar. En termes clairs, le nouvel actionnaire prendra une participation minoritaire, même si les deux parties n’ont pas précisé le nombre de parts libérées ou le montant de la transaction. Ce jalon posé par le top management de NMA vient concrétiser une vision de son fondateur, Ameth Amar, qui avait déjà entamé le processus de partenariat avant son rappel à Dieu, le 22 juillet 2019. Certes, cette opération n’est pas nouvelle au Sénégal, puisque des recapitalisations on en a connues déjà dans le passé. Mais la particularité c’est lorsque le privé entre dans la danse et décide de repenser son mode de gouvernance. L’une des plus récentes est la prise de participation du tandem Galileo/Providence dans le capital du Groupe Institut supérieur de management (ISM) de Amadou Diaw.
L’ouverture du capital de son groupe, en décembre 2016, à un partenaire de rang mondial et leader dans son domaine lui ouvrait largement ses portes aux opérateurs internationaux et aux fonds d’investissement. Près cinq ans près, NMA est venue s’inscrire dans la même démarche. Cette signature avec Amethis marque l’entrée de NMA dans une nouvelle phase de son développement. En même temps, elle marque une révolution dans l’écosystème des entreprises sénégalaises longtemps cloitrées dans un confort classique fuyant toute prise de risque. Le monde du business bouge, les acteurs innovent, de nouveaux mécanismes de financement font leur apparition et l’univers des entreprises sénégalaises ne peut pas rester insensible face à ce mouvement. Elles sont contraintes de s’adapter pour tirer profit des opportunités qu’offrent les marchés dans lesquels ils opèrent.
Le monde devient de plus en plus compétitif et globalisé dans la quasi-totalité des branches de l’économie. L’une des solutions pour tirer son épingle du jeu réside, entre autres, dans la fusion-acquisition et les prises de participation. A défaut de pouvoir procéder à l’ouverture de son capital par le mécanisme des marchés financiers, à travers une Offre publique de vente (Opv) comme ce fut le cas pour le Total Sénégal et Boa/Sénégal, les entreprises sénégalaises ont également cette possibilité d’accueillir d’autres actionnaires par une prise de participation. Ce qui constitue un tournant décisif dans le système de management des boites dont l’essentiel sont caractérisées par une gestion familiale. Dans un contexte où l’accès aux ressources financières bancaires reste une préoccupation pour une bonne partie de nos entreprises en raison d’une panoplie de garanties exigées, la recapitalisation offre la possibilité aux entreprises de renforcer leur fonds propres en acquérant de nouveaux financements. La recapitalisation, au-delà de sa fonction de mécanisme permettant aux entreprises de partager leur risque avec d’autres actionnaires, elle leur offre aussi la possibilité d’assurer leur expansion en vue de conquérir d’autres parts de marchés.
L’exemple de NMA vient montrer que les chefs d’entreprise de notre pays sont plus que jamais ouverts et conscients des enjeux actuels de l’univers du business. Ce changement de paradigme qui s’opère difficilement sous nos cieux est à encourager si l’on sait que beaucoup de nos « champions » sont encore soumis à une gestion familiale. Un système de management qui offre moins de marge d’ouverture aux fonds d’investissement et à la recapitalisation. Un changement radical de paradigme dans le mode de gouvernance s’impose aux entreprises qui souhaitent capter les ressources des véhicules d’investissement tels que les Private-equity. Pour attirer les investisseurs dans leur capital, il s’avère nécessaire pour les entreprises de rompre avec les vieilles méthodes de gestion et de faire de la transparence, un viatique.
Par Abdou DIAW, Journaliste économique