Dans un communiqué parvenu à notre rédaction Greenpeace Afrique répond au ministre des Affaires étrangères Mme Aïssata Tall Sall suite à une interview accordée à un journal français Ouest-France où elle a rejeté les inquiétudes des pêcheurs et femmes transformatrices concernant la surexploitation des ressources halieutiques.

En réponse à l’interview   de la ministre avec le journal français Ouest-France, Dr Aliou Ba, responsable de la campagne océan au bureau de Greenpeace Afrique à Dakar, affirme qu’ :« Il est choquant que la ministre ait publiquement rejeté les inquiétudes des pêcheurs et des femmes transformatrices concernant la surexploitation de leurs ressources halieutiques comme des « fantasmes », alors que ces inquiétudes sont basées sur une science sans équivoque. Peut-être qu’elle pensait pouvoir s’en tirer, parce qu’elle parlait à un journal français.

« La ministre a donné des mots d’espoir aux communautés de pêcheurs artisanaux, mais a clairement indiqué que son gouvernement n’agirait pas pour les aider. Elle n’a pas tenu tête aux politiciens européens qui pourraient retenir les chalutiers industriels qui volent actuellement le poisson des communautés côtières d’Afrique de l’Ouest. Et elle a salué les investissements chinois dans les infrastructures sénégalaises sans critiquer la construction des usines de transformation de farine de poisson qui détruisent le secteur artisanal.

« Il est profondément trompeur de la part de la ministre de prétendre que le maintien de ces accords de pêches fournira des flux de trésorerie qui soutiendront la pêche artisanale. Alors que les pêcheurs et les femmes transformatrices ont désespérément besoin de la part du  gouvernement qu’il bloque l’accès des chalutiers européens – et à tous les autres chalutiers qui détruisent leurs eaux. Ce n’est qu’ainsi que nos ressources halieutiques, ainsi que les emplois et la sécurité alimentaire, seront protégés pour les générations actuelles et futures. »

 Les rapports successifs de l’ONU ont montré que les ressources halieutiques et pélagiques    au large des côtes de l’Afrique de l’Ouest sont menacées par la surpêche. Pour plus d’informations, voir le rapport de Greenpeace Afrique Nourrir le monstre.

 Voici des extraits de l’interview   de la ministre dans Ouest-France :

Les accords de pêche entre le Sénégal et l’Union européenne ont été renouvelés en 2020. Cela concerne, par exemple, des bateaux français, espagnols et portugais. Certaines voix écologistes disent que ces accords n’aident pas la pêche artisanale sénégalaise. Avez-vous évoqué cette question ici, à Brest, lors de vos entretiens ?

« Il était question pour nous d’évoquer une nouvelle alliance pour notre partenariat. Comment refonder nos relations de façon plus concrètes et positives. Nous avons abordé les accords de pêche. L’Afrique et le Sénégal peuvent être des pourvoyeurs de produits de la pêche. Il y a beaucoup de débats, chez vous comme chez nous, sur ces accords de pêche, qui sont anciens. La finalité de ces accords : que le Sénégal mette à disposition de l’Europe un produit naturel, qui se reconstitue naturellement. D’où l’intérêt de respecter les temps de repos et les aires de repos du poisson pour la reconstitution de la ressource. Il faut dire aussi qu’il y a beaucoup de fantasmes sur cette question. L’essentiel pour le Sénégal est qu’il puisse honorer ses engagements, s’assurer d’une rentrée d’argent qui permettra de mieux soutenir l’industrie de la pêche et la pêche artisanale. Il n’est pas question pour nous de tuer la pêche artisanale au profit de la pêche industrielle. »

(…)

La Chine est présente économiquement au Sénégal et vous aide à investir. Peut-elle jouer un plus grand rôle demain, d’un point de vue diplomatique ?

« La Chine a un rôle à jouer : elle est l’un des cinq membres permanents du Conseil de sécurité des Nations unies. Pour le Sénégal, elle est un partenaire avec qui nous travaillons de façon transparente. Nous n’avons pas d’exclusivité ni d’exclusion en matière de diplomatie. La Chine a pu financer plusieurs infrastructures au Sénégal. Ces infrastructures sont l’Alpha et l’Oméga de l’Afrique, qui ne commerce qu’à hauteur de 13 % de ses potentialités. Pourquoi ? Parce que nous manquons de routes, de voies aériennes et maritimes. Voilà pourquoi quand un partenaire vient nous proposer des prêts, que nous remboursons, nous ne pouvons pas lui fermer la porte au nez. Pour autant, nous continuons de penser que l’Europe est un partenaire important, historique. C’est notre premier partenaire économique et financier. »