Pour son premier déplacement hors du territoire national depuis sa prise de fonction, le nouveau président de la République du Sénégal, M. Bassirou Diomaye Faye se rend aujourd’hui à Nouakchott en République Islamique de Mauritanie. M. Alla Séne, économiste et membre de la CNES et M. Magaye Gaye, économiste international évoquent des enjeux pétroliers, gaziers et surtout de pêche de la visite du Président sénégalais en terre mauritanienne.
M. Magaye Gaye, économiste international, a souligné : « Je pense que la visite du Président Bassirou Diomaye Diakhar Faye en Mauritanie est une bonne occasion de renforcement des relations séculaires entre la Mauritanie et le Sénégal. Comme vous le savez, ce sont deux pays proches culturellement, géographiquement, religieusement également parce qu’il y a à rappeler que le Sénégal depuis très longtemps entretient des relations avec la Mouridiya, la Mauritanie comme vous le savez a en son sein une obédience khadriya représentée par Cheikh Sidiya ».
Il estime que les deux pays sont liés par l’histoire, la géographie mais également par l’économie et les échanges estimés, tourneraient autour de 107 millions de dollars
Les enjeux pétroliers et gaziers
Il rajoute : « Ces deux pays sont aujourd’hui concernés comme d’un commun accord par le gaz du jugement Grand Tortue. Cela montre que les intérêts sont communs, il va falloir faire un suivi. Du point de vue de la pêche, ce sont deux pays qui ont des façades maritimes mais qui doivent réfléchir ensemble sur les grands défis. Le Sénégal ayant des problèmes au niveau de ses réserves halieutiques, est obligé de se tourner vers la Mauritanie ».
Toujours d’après M. Gaye, il y a aussi le pont de Rosso qui est très important pour les deux pays et il faut réfléchir sur sa faisabilité, réfléchir sur les droits de douanes à instituer. Il a évoqué le défi sécuritaire pour les deux pays avec la menace djihadiste dans la sous-région.
Quant à M. Alla Séne, économiste, membre de la CNES, il affirme : « Il y a les enjeux pétroliers qui font que le Président se rende en Mauritanie. Il y a aussi tout ce qui touche la pêche, la Mauritanie a octroyé au Sénégal des licences de pêche. Il y a beaucoup de pêcheurs sénégalais qui sont en Mauritanie. Le Président est parti là-bas à cause des urgences sur le pétrole, le gaz. La plus grande partie de la plateforme se trouve en Mauritanie. Et l’autre aspect, c’est religieux, beaucoup de marabouts sénégalais ont fait leur humanité en Mauritanie. Il y a tout cela qui fait les relations entre le Sénégal et la Mauritanie sont spéciales. Les mauritaniens ont confiance au franc CFA, les commerçants mauritaniens acceptent le F CFA, on n’a pas besoin de change. Ils ont la confiance au Sénégal, et la monnaie est facteur de confiance. Et nous partageons le fleuve du Sénégal ».
Selon M. Séne, le Président devait commencer par le Mali parce que On tient plus de relations commerciales avec le Mali et les échanges commerciaux, ça tourne aux alentours de 800 milliards.
« Le Mali effectue les 2/3 de ses approvisionnements en pétrole sur le Sénégal. Les investissements sénégalais à l’étranger sont plus nombreux au Mali à cause de la Sonatel. Si on se basait sur l’existant, la premiére visite du Président devait se faire Mali parce qu’il y a une forte colonie sénégalaise là-bas, des tailleurs, des bijoutiers, des menuisiers et beaucoup d’entrepreneurs. Presque beaucoup de sociétés maliennes sont dirigées par des sénégalais », dira M. Séne.
Beaucoup d’observateurs estiment que cette visite marque une étape importante dans les relations diplomatiques entre les deux pays.
Élu le 24 mars dernier, le chef de l’État sénégalais rencontrera le président mauritanien Mohamed Ould Ghazouani, qui occupe également la présidence en exercice de l’Union Africaine. Et cette rencontre intervient dans un contexte de renforcement des liens entre les deux nations. Le président mauritanien Mohamed Ould Ghazouani avait assisté à la cérémonie d’investiture du nouveau président sénégalais, le 2 avril dernier au centre d’exposition de Diamniadio. Les deux hommes avaient également eu un long entretien téléphonique au lendemain de la victoire dès le premier tour du candidat de la coalition Diomaye-Président, au cours duquel le président par intérim de l’UA a félicité Bassirou Diomaye Faye.
Le Chef de l’État profitera de cette première visite officielle pour raffermir les liens de bon voisinage et passer en revue avec son homologue mauritanien la coopération qui lie les deux pays, notamment dans le domaine de l’exploitation du gisement gazier Grand Tortue Ahmeyin (GTA). Estimé à 450 milliards de mètres cubes de gaz, ce champ à cheval sur la frontière maritime sénégalo-mauritanienne est considéré comme l’un des plus importants en Afrique de l’Ouest. Son entrée en exploitation a été reportée au troisième trimestre de 2024.
Situé à 115 kilomètres des côtes mauritano-sénégalaises, Grand Tortue Ahmeyim (GTA) est l’un des champs gaziers les plus prometteurs du continent.
Sa découverte a été officiellement annoncée en avril 2015. Estimées à 25 000 milliards de pieds cubes, les réserves ont été découvertes par la Junior texane Kosmos Energy entre 2012 et 2013.
Le projet Grand Tortue Ahmeyim (GTA) – Phase 1
À la frontière maritime entre la Mauritanie et le Sénégal, à une profondeur de 2 850 m, bp et ses partenaires développent un champ gazier offrant un potentiel de production de 30 ans. Le Champ Grand Tortue Ahmeyim (GTA) a le potentiel d’être une source d’énergie domestique et de revenus pour la Mauritanie et le Sénégal. Le projet GTA ne représente qu’une partie de la superficie d’environ 13 500 km2 détenue par bp et ses partenaires en Mauritanie et au Sénégal, dont le potentiel de ressources gazières est estimé entre 50 et 100 tcf. On estime que le GTA seul contient plus de 15 tcf de ressources gazières potentiellement récupérables.
Bp s’engage à aider les deux pays à développer leurs ressources de classe mondiale de manière durable.
En décembre 2018, bp a annoncé sa décision finale d’investissement (FID) pour la phase 1 du développement transfrontalier innovant Grand Tortue Ahmeyim, suite à un accord conclu entre les gouvernements mauritaniens et sénégalais et les partenaires bp, Kosmos Energy et les deux compagnies pétrolières nationales, la Société des Pétroles du Sénégal (PETROSEN) et la Société Mauritanienne des Hydrocarbures (SMH).
Cela a marqué le début d’un projet en plusieurs phases qui devrait avoir un impact durable et positif pour les générations à venir.
Un projet multi-pays
Ce projet transfrontalier est l’un des projets offshores les plus complexes au monde. Le gaz sera produit à partir d’un système de production sous-marin d’eau ultra-profonde et traité dans l’eau moyenne par une unité flottante de production, de stockage et de déchargement (FPSO). Le FPSO est en cours de construction en Chine et, une fois achevée, elle sera remorquée pour être positionnée sur le bord du plateau continental à une profondeur d’eau d’environ 120 m. Le FPSO traitera le gaz, en éliminant l’eau et les impuretés avant la liquéfaction. Le gaz sera ensuite acheminé sur environ 35 km via un pipeline vers le Hub/Terminal côtier, qui comprend une digue fournissant abritant une installation flottante de gaz naturel liquéfié (FLNG). Le FLNG est en cours de construction à Singapour et conçu avec une capacité de production d’environ é,5 millions de tonnes de GNL par an. Dans le cadre du processus de liquéfaction, le gaz sera refroidi à des températures inférieures à 150 °C afin de le transformer en liquide, ce qui permet son stockage et son transport sur longues distances. Le gaz naturel liquéfié (GNL) du projet GTA sera exporté via des méthaniers qui accosteront au Terminal pour se rendre ensuite à leurs destinations finales du marché international, générant des revenus pour les deux pays.
Par Massaër DIA (Lii Quotidien)