Selon l’agence de notation Moody’s Investor Service, les banques africaines feront preuve de résistance en 2019, en particulier les banques égyptiennes, marocaines et mauriciennes notées par Moody’s, mais le resserrement de la situation financière mondiale représente un nouveau risque qu’elles ne devront pas perdre de vue.

Les performances divergent d’une région à l’autre

«  Pour 2019, nous prévoyons que la plupart des banques notées maintiendront une rentabilité stable, accumuleront des réserves de fonds propres et conserveront un financement suffisant en monnaie locale », écrit Moody’s dans ses nouvelles perspectives publiées fin 2018. « Tandis que la croissance en Afrique se redresse, elle reste inférieure au potentiel. Nos perspectives stables pour les banques africaines reflètent les attentes d’une légère accélération de la croissance et d’une réglementation plus stricte qui favorise la stabilité financière, mais les risques sont toujours présents », a ajouté l’agence de notation.

Parmi ces risques Moody’s liste ceux liés à l’environnement opérationnel, notamment à cause des taux d’intérêt américains entraînant des sorties de capitaux sur les marchés émergents, conjuguées à la hausse de la dette publique et à la dépréciation de la monnaie, ce qui pourrait nuire considérablement à la qualité des prêts des banques africaines et à leur accès aux devises.

Les analystes du rapport s’attendent à ce que plusieurs économies africaines affichent une légère reprise, les perspectives macroéconomiques se renforçant légèrement. L’agence de notation prévoit une croissance du PIB de 3,8 % en 2019, contre 3,1 % en 2018 et 2,7 % en 2017 pour les pays notés. Cette croissance devrait être tirée par les prix relativement stables du pétrole et des produits de base, une production agricole plus forte, des ajustements de la politique intérieure et une demande intérieure forte. La croissance proviendra principalement de l’Afrique de l’Est, de l’Égypte et de l’Union économique et monétaire ouest-africaine (UEMOA), qui comprend le Bénin, le Sénégal, le Burkina Faso, la Côte d’Ivoire, le Mali, le Niger, le Togo et la Guinée-Bissau.

Les géants nigérians et sud-africains scrutés

La croissance sera toutefois modérée au Nigeria et en Afrique du Sud, respectivement de 2,3 % et 1,3 %, a déclaré Moody’s, qui s’attend à ce que des prix du pétrole plus stables stimulent l’accélération économique au Nigeria et prévoit une confiance accrue des entreprises et des investisseurs en Afrique du Sud. En effet, la fin de l’année 2018 a été plus bénéfique pour les banques de ces pays. Au Nigeria, Access Bank Plc a racheté l’établissement de crédit Diamond Bank en grande difficulté. Cet accord fera d’Access Bank le leader national face à des géants comme Guaranty Trust Bank (GTBank) et Zenith Bank Plc., qui vont elles aussi se renforcer. Au Kenya, la plus grande banque commerciale privée, Commercial Bank of Africa (CBA) et la National Industrial Credit Bank (NIC) cotée à la Nairobi Securities Exchange (NSE), ont annoncé leur fusion pour devenir la troisième plus grande banque du pays. Le groupe bancaire panafricain Oragroup présidé par Vincent Le Guennou et qui est dirigé par la Malienne Binta Touré Ndoyea levé 56,9 milliards de francs CFA, soit près de 100 millions de dollars. La plus importante opération de tous les temps sur la Bourse régionale des valeurs mobilières (BRVM), basé en Côte d’Ivoire.

Pour Moody’s, les régulateurs ont également intensifié leurs efforts en 2018 en infligeant des amendes aux banques qui ne respectent pas les règles. « Une réglementation plus stricte et une meilleure supervision aideront également à résoudre les problèmes de gouvernance hérités du passé et à soutenir la stabilité financière des banques. »

Un secteur à fort potentiel

Ce qui renforce l’analyse de l’agence de notation selon laquelle le secteur bancaire en Afrique a un potentiel de croissance important à long terme. « En effet, la marge est encore grande. Premièrement, le taux de pénétration des banques est toujours faible (actifs bancaires à environ 63 % du PIB, selon le FMI), alors que l’urbanisation est croissante, l’utilisation accrue de la technologie mobile en particulier devrait permettre de libérer le potentiel. Déjà, les comptes uniques d’argent mobile en Afrique subsaharienne ont atteint le nombre de 280 millions. En outre, l’utilisation de comptes d’argent mobile présente des avantages considérables pour les banques, notamment concernant les frais liés aux transferts. Cet usage accéléré du mobile money permettra la réduction des coûts, car la technologie mobile utilise des agents à la place des succursales bancaires, et finalement augmentera la pénétration bancaire », dit Moody’s.

Toutefois, à court terme, Moody’s s’attend à ce que la qualité des prêts reste sous pression. Cela sera motivé par des problèmes hérités du passé, tels que des pratiques de gestion des risques faibles. « Pour 2019, nous prévoyons que le capital augmentera légèrement, sous l’effet de la génération de capital interne et du versement de dividendes modestes. La qualité du capital restera également solide », ajoute Moody’s. Mais la rentabilité des banques africaines reste globalement stable analyse Moody’s avec un rendement des capitaux propres avant impôts d’environ 16,5 % et un rendement des actifs de 1,9 %.

Source:Lepointafrique