Nairobi est depuis une décennie, un laboratoire à ciel ouvert pour la finance mobile portée par l’explosion du mobile banking. Une tendance qui a entraîné une explosion de l’offre de crédits par des entreprises fintech, ce qui fait craindre un surendettement par la Banque centrale dont le gouverneur souhaite la mise en place d’une régulation à part pour ce segment.

Le Kenya connaît un boom des prêts accordés par les entreprises de technologie financière (Fintech). Un phénomène qui aurait entraîné une augmentation des pratiques de prêts abusives, selon la Banque centrale dont le gouverneur a appelé à réglementer le secteur. Le pays fait partie des pionniers de l’inclusion financière en adoptant très tôt un système qui permet à ses utilisateurs de transférer de l’argent et d’effectuer des paiements sur téléphone portable sans compte bancaire.

Explosion de l’offre de crédits

Ce sont aujourd’hui plus de 20 entreprises qui utilisent la même technologie pour accorder des crédits aux clients qu’ils soient bancarisés ou non, des créances qui sont accompagnées de taux d’intérêts élevés. Les kényans sont ainsi passés d’avoir peu ou pas d’accès au crédit à la possibilité de décrocher un prêt en quelques minutes.
«Il y’a une augmentation dans les institutions de type financier qui profitent de notre population.

Dans un certain sens, ce qui s’est passé, c’est qu’il y’a une opportunité pour certains prédateurs et ils s’en prennent à nos concitoyens», a alerté Patrick Njoroge, gouverneur de la Banque centrale kényane, en marge d’une réunion avec les dirigeants de l’industrie des services financiers numériques.

En effet, lors de trois dernières années, 2,7 millions de personnes sur une population de près de 45 millions ont été cotées négativement au niveau des bureaux de référence du crédit du Kenya. Comme pour l’argent mobile, le pays est considéré comme une plateforme de test pour de nouvelles formes de prêt.

Les kényans, des cobayes pour la fintech ?

Plusieurs des entreprises impliquées, dont des start-ups fintech américaines ont l’intention de se développer sur d’autres marchés frontalier, ce qui signifie que la réglementation du Kenya sera surveillée de près. Une situation qui n’est pas du goût du gouverneur de la Banque centrale, qui n’aime pas que son pays soit «un cobaye» pour les nouvelles technologies déployées par des entreprises étrangères.

«Ce qui m’inquiète, c’est que beaucoup de produits arrivent dans une sorte d’opération à la volée et que vous n’en entendez parler que parce que quelqu’un est en banqueroute», a déclaré Njoroge. Pour le patron de la Banque centrale, les risques encourus par les kényans montrent qu’il y’a un besoin de réglementation dans le secteur en plein essor. Un projet de loi publié récemment par le ministère des Finances pour examen et commentaires par le public et les professionnels indique que les prêteurs numériques seront agréés par une nouvelle Autorité des Marchés Financiers et que les prêteurs seront liés par les plafonds d’intérêt fixés par cette structure.
Reste à savoir si les prêteurs numériques seront soumis au plafonnement actuel des taux d’intérêts des banques. Un plafond qui a ralenti la croissance du crédit au secteur privé depuis son introduction en 2016. La Banque centrale n’a pour l’heure pas commenté le projet de loi.
(Source : https://afrique.latribune.fr)