La concentration des richesses s’est encore accentuée en 2018 : 26 milliardaires ayant désormais entre leurs mains autant d’argent que la moitié la plus pauvre de l’humanité, a dénoncé lundi l’ONG Oxfam, qui appelle les États à taxer les plus riches.

En 2018, les 26 personnes les plus riches du monde détenaient autant d’argent que la moitié la plus pauvre de l’humanité, a dénoncé lundi 21 janvier l’ONG Oxfam, qui appelle les États à taxer les plus riches. « Le fossé qui s’agrandit entre les riches et les pauvres pénalise la lutte contre la pauvreté, fait du tort à l’économie et alimente la colère dans le monde », a affirmé Winnie Byanyima, directrice exécutive d’Oxfam International, citée dans le communiqué.

Les gouvernements « doivent s’assurer que les entreprises et les plus riches paient leur part d’impôts », a-t-elle ajouté, à l’occasion de la publication du traditionnel rapport annuel d’Oxfam sur les inégalités mondiales en amont du Forum économique mondial qui se tient jusqu’à vendredi à Davos.

Selon les chiffres de l’ONG, dont la méthodologie, qui s’appuie sur les données publiée par la revue Forbes et la banque Crédit suisse, est contestée par certains économistes, 26 personnes disposent désormais d’autant d’argent que les 3,8 milliards les plus pauvres de la planète. En 2017, ils étaient au nombre de 43.

Quant à l’homme le plus riche du monde, Jeff Bezos, le patron d’Amazon, sa richesse a atteint 112 milliards de dollars l’an dernier. Or, « le budget de santé de l’Ethiopie correspond à 1 % de sa fortune », a souligné l’ONG.

Deux fois plus de milliardaires depuis la crise de 2008

D’une manière générale, la richesse des milliardaires dans le monde a augmenté de 900 milliards l’an dernier, soit au rythme de 2,5 milliards par jour, alors que celle de la moitié la plus pauvre de la population de la planète a chuté de 11 %, a-t-elle précisé.

Le nombre de milliardaires a d’ailleurs doublé depuis la crise financière de 2008, a souligné Oxfam, constatant que « les riches bénéficient non seulement d’une fortune en pleine expansion, mais aussi des niveaux d’imposition les moins élevés depuis des décennies ».

« Si la tendance était inversée, la plupart des gouvernements auraient suffisamment de ressources pour financer les services publics », a souligné l’ONG qui estime que « la richesse est tout particulièrement sous-taxée ». Elle a ainsi précisé que sur un dollar d’impôt sur le revenu, seulement quatre centimes proviennent de la taxation de la richesse.

Des impôts plus élevés pour les plus pauvres

Pour Pauline Leclère, porte-parole d’Oxfam France : « Après les États-Unis, la France est le pays qui a connu la plus forte progression de millionnaires en 2018. Aujourd’hui, en France, 8 milliardaires français possèdent autant que les 30 % les plus pauvres, suivant une tendance qu’a empruntée nombre de pays riches avant nous. La responsabilité des gouvernements est sans équivoque : loin de s’attaquer aux inégalités, ils les aggravent d’un côté en allégeant allègrement la taxation des entreprises et des plus fortunés, et en renonçant à combattre l’évasion fiscale tandis que de l’autre, ils sous-financent les services publics, au détriment des plus pauvres et des femmes notamment. »

Selon Oxfam, qui estime que les plus riches cachent au fisc 7 600 milliards de dollars, dans certains pays comme le Brésil ou le Royaume-Uni, « les 10 % les plus pauvres paient désormais des impôts plus élevés en proportion de leurs revenus que les plus riches ».

Ce rapport est publié à un moment où la taxation des plus grandes fortunes suscite des débats dans plusieurs pays. En France, le mouvement des Gilets jaunes a relancé le débat sur la suppression de l’ISF par Emmanuel Macron. Aux États-Unis, la députée démocrate Alexandria Ocasio-Cortez, fraîchement élue, a proposé de taxer à 70 % les plus riches, obtenant le soutien du Prix Nobel d’Economie Paul Krugman.