D’après la Banque mondiale, en Afrique de l’Ouest, le coût des dommages de la pollution plastique marine est estimé entre 9 000 à 30 000 euros la tonne. Et ce fléau impacte non seulement le littoral mais aussi la vie des agriculteurs : lorsque les déchets plastiques sont brûlés dans les champs, aucune graine ne peut germer. Exemples de solutions proposées.

Cinq millions de sacs plastiques utilisés par jour par la population dakaroise

« Ces sachets font partie des cinq millions de sacs plastiques que la population dakaroise utilise chaque jour avant de les jeter dans la rue. » Avec son étrange tenue confectionnée à partir de déchets plastiques ramassés dans les rues, Modou Fall, connu sous le nom de Mr. Plastic, opère ainsi depuis des années pour sensibiliser les personnes à la pollution plastique.

Un désastre écologique qui saute aux yeux

D’après la source, en 2018, 6,9 millions de tonnes de déchets plastiques ont été rejetés par les 17 pays côtiers d’Afrique de l’Ouest. Et le Nigeria à lui seul en produit 4,7 millions de tonnes par an. Avec 20% de ces déchets produits dans les 30 kilomètres de la côte, la plupart finissent leur parcours dans l’océan.

La source précise qu’en réponse à cet enjeu sans précédent, le programme de gestion du littoral Ouest-Africain (WACA) financé à environ $563 millions par la Banque mondiale et ses partenaires, a préparé une série de rapports sur les impacts de la pollution plastique, les opportunités pour une économie circulaire, la gestion par le Sénégal des bouteilles en polyéthylène téréphtalate (PET) en fin de vie, avec un e-book sur les ressources pour aider les individus à créer leur propre logique de mobilisation.

« En Afrique de l’Ouest, le coût des dommages de la pollution plastique marine est estimé entre $10 000 à $33 000 la tonne. La pêche et l’aquaculture, le tourisme maritime, la valeur des propriétés en bord de mer, la biodiversité et les écosystèmes sont les secteurs touchés de plein fouet », renseigne le document. 

« La terre et le bétail sont nos seules richesses. Lorsque les déchets plastiques sont brûlés dans les champs, aucune plante ne peut pousser et aucune graine ne peut germer. Nos vaches, chèvres, et moutons mangent le plastique qui jonche les rues et en meurent » souligne Ndiouck Mbaye,Présidente des femmes rurales du Sénégal.

Et le document de rajouter : « Le village de Joal sur la côte sénégalaise en est une illustration. Assis sur une île de coquillages de mer, Joal est cerné par une marée plastique. Des milliers de sachets plastique usagés jonchent la plage, s’accrochent aux branches des mangroves qui servent de pépinière aux crabes et poissons, s’enlacent aux bébés tortus et les empêchent de faire leur parcours du nid à la mer, et éloignent les touristes ».

80% des déchets plastiques mal gérés dans les zones côtières ouest-africaines

Toujours d’après la banque mondiale, près de 80% des déchets plastiques mal gérés dans les zones côtières ouest-africaines, posent des défis croissants aux populations, aux économies, et à l’environnement côtier et marin.

Le fléau impacte directement la vie des agriculteurs au Sénégal

D’après la Banque mondiale, le fléau impacte directement la vie des agriculteurs. A Kaolack au Sénégal, Ndiouck Mbaye, présidente des femmes rurales du Sénégal, se désole : « La terre et le bétail sont nos seules richesses. Lorsque les déchets plastiques sont brûlés dans les champs, aucune plante ne peut pousser et aucune graine ne peut germer. Nos vaches, chèvres, et moutons mangent le plastique qui jonche les rues et en meurent ».

Impliquer les entreprises et créer de nouvelles richesses.

« La majeure partie de la pollution plastique provient des emballages, et principalement du plastique à usage unique utilisé pour la consommation d’eau et d’aliments, ou à des fins sanitaires. L’appui des acteurs et des entreprises conscients de leurs responsabilités est crucial pour une réforme réussie », renseigne la source.

D’après la Banque mondiale, le Groupe Kirène qui produit 700 000 litres de boisson par jour, oriente sa production à 88% sur les bouteilles d’eau grand format de 1,5 ou 10 litres afin de diminuer l’usage des petits sachets d’eau ou de petites bouteilles au cœur du problème.

La source précise qu’aujourd’hui incontournables en Afrique de l’Ouest, elles permettent aux plus vulnérables d’avoir accès à de l’eau potable peu chère.Eten 2014, au Ghana, avec l’utilisation de conteneurs d’eau en plastique, le taux de mortalité infantile a chuté de 42 %. Kirène étend désormais ses activités vers le recyclage avec des partenaires tels que Recuplast.

« Notre branche Recuplast est spécialisée dans la récupération de bouteilles, l’écogeste et la promotion de l’économie circulaire. Ce réseau de collecte de déchets plastiques, récupère le plastique, paye les gens ou leur donne des produits recyclés tels que bassines, tables et chaises. Nous pensons même à créer des menuiseries qui feraient des meubles avec le plastique recyclé au lieu de couper les arbres et d’aggraver la déforestation, » explique le directeur Macoumba Diagne. D’après la source, aujourd’hui, Recuplast collecte entre 100 et 150 tonnes de déchets plastiques par mois, a embauché 240 personnes et en fait vivre 5 400 par des activités liées à la récupération.

Des élus et communautés engagés

Mais la mobilisation dans ce combat phare du 21è siècle se fait aussi au niveau des élus. Pour Dudu Jalloh, conseiller municipal à Kanifing en Gambie, il s’agit aussi de sensibilisation : « Bien que des lois existent, il est difficile de les faire respecter. Nous avons besoin d’un programme agressif de sensibilisation du public. »

Car les mauvaises habitudes ont la peau dure. Certains pêcheurs reconnaissent volontiers que leurs pratiques sont nocives : « Quand nous partons en mer, nous emportons de l’essence, de la nourriture, du thé, du charbon emballés dans des plastiques que nous jetons ensuite à la mer, » explique Abdou Rahman, pêcheur de Bargny au Sénégal. Et d’ajouter cette anecdote qui témoigne de l’ampleur du problème : « Avant même d’entrer en mer, le plastique s’enroule autour de nos moteurs et nous empêche de travailler et de nourrir nos familles. »

Son collègue Macodou Gueye insiste : « Un autre problème concerne nos filets. Certains sont en plastique, lorsqu’ils s’abîment, nous les laissons dans la mer. » Et lorsqu’on lui demande ce qu’il voit le plus en mer : « des centaines et des centaines de couches de bébés qui flottent partout ! »

Des solutions proposées

« L’Afrique de l’Ouest dispose de peu d’usines de fabrication de produits plastiques. La plupart des pays dépendent des importations de résines plastiques vierges et de produits plastiques. Des investissements s’imposent dans la gestion de ces déchets avec leur collecte, le tri du plastique en vue de sa réutilisation et de son recyclage et en ultime recours, son enfouissement dans les décharges. Le modèle linéaire actuel (produire – consommer – jeter) doit évoluer vers un modèle d’économie circulaire du plastique et être accompagné par des innovations et un cadre réglementaire adapté. Ceci nécessite également des investissements du secteur privé et la création de marchés dynamiques pour les plastiques recyclés et les substituts aux plastiques », précise la source.

Et le document de rajouter : « La Banque mondiale intervient à chaque étape du cycle de vie du plastique pour accompagner les pays dans leur lutte contre ce fléau, avec des projets d’une valeur de plus de $2,5 milliards axés sur la gestion et la prévention de la pollution plastique. Elle apporte également de l’expertise, encourage les investissements privés et soutient les institutions régionales pour apporter des solutions transfrontalières ».

Pour Isatou Ceesay, une réforme doit commencer à la maison par les femmes et les enfants. Son ONG, Women in Gambia, éduque les enfants sur la gestion des déchets et apprend aux femmes à les recycler en sacs, pochettes, et porte-clés, se créant ainsi un revenu.

« Un modèle d’économie circulaire pourrait réduire les déchets plastiques de 40 à 50%, soit 2,9 à 3,8 millions de tonnes de déchets plastiques et éviter qu’ils finissent en déchets environnementaux en 2026. Ce qui correspondrait à une diminution des émissions de carbone de 30 à 60 %, soit des émissions de CO2 situées entre 6 et 9,1 millions de tonnes », conclut-on dans le document.