L’installation de WOODSIDE pour l’exploitation du pétrole de SANGOMAR est perçue par les pêcheurs de Djiffère, Dionwar et Niodior (Fatick) comme une menace pour les activités de pêche et les activités connexes. Devant les bruits qui enflent au sein de ces   populations habitant ces îles à propos de l’avenir de la pêche, aucune assurance de la part des autorités. Les pêcheurs sont dans le désarroi et craignent plutôt une malédiction du pétrole qui se résume à une présence en mer d’un liquide toxique tuant les poissons, une accélération de l’érosion côtière et des craintes sur l’activité de pêche, les activités connexes et l’aire maritime protégée.

Par Massaër DIA ( LII QUOTIDIEN)

Il est 15 heures à Djiffère et la chaleur est au rendez-vous. A la plage de Djiffère, à quelques encablures du quai de pêche de la localité, règne une insalubrité indescriptible. Des tas d’immondices, des déchets constituant en grande partie de filets de pêche, des restes de poissons pourris, une odeur nauséabonde, campent le décor. Les charognards survolent les montages d’ordures à la recherche de quoi manger. Du côté du lieu d’implantation des mareyeurs, les eaux usées et les saletés, empêchent de circuler librement. Tout visiteur est obligé de faire des détours pour éviter de patauger dans les eaux usées qui dégagent une odeur nauséabonde. De la mer on ne voit que les vagues qui viennent mourir sur le rivage où l’érosion côtière est bien visible car beaucoup de maisons qui longeaient le long de la plage, sont englouties par la mer.

De par cette position faisant face à la mer, on aperçoit de très loin les îles de Sangomar, Dionwar et Niodior avec un brouillard épais rendant la visibilité assez floue, ce qui prouve qu’il y a une distance considérable entre les îles. Malgré tout, les mareyeurs, vendeuses de poissons et clients ont l’œil rivé sur le large, scrutant l’arrivée des embarcations parties à la pêche.  Mais un regard jeté sur un coin de la plage, où nombre de pirogues sont parquées, renseigne sur une réalité : les pêcheurs n’ont pas été nombreux à braver les flots.

La prudence est de mise face aux intempéries. Ceux qui ont bravé la mer n’ont cependant guère été heureux car le poisson se fait rare. Tout au long de la plage, beaucoup de pirogues sont à l’arrêt.  Avec ces pirogues alignées à perte de vue, on se croyait dans un « cimetière de pirogues ». Ce qui est très étonnant, c’est le fait que les gens font leurs besoins à l’air libre entre les pirogues garées. Ce qui renseigne sur l’absence de toilettes aux abords du quai. Les cris des oiseaux marins viennent s’ajouter aux bruits des vagues. Cette journée de pêche infertile, est loin d’ébranler les pêcheurs, mareyeurs qui se retrouvent autour de la théière pour boire le thé. Les vendeuses qui attendent sur la plage ont toujours les yeux tournés vers le large, le visage mangé par l’inquiétude.

Au bout de leurs bras, les bassines et seaux vides pèsent de plus en plus. Dans le silence, rompu de temps à autre par les cris des oiseaux marins, un murmure d’un pêcheur : « On dirait que les changements climatiques et la découverte du pétrole à Sangomar ont commencé à faire notre malheur ». Ici l’incertitude face à l’avenir habite aussi bien les jeunes que les vieux. Le pétrole, tout le monde en parle et nul ne sait de quel côté le vent va tourner. Des craintes sont soulevées notamment pour l’aire marine protégée, l’érosion côtière, la présence de liquide toxique tuant les poissons et la menace sur l’activité de pêche et les activités connexes.

Ici à Djiffère, beaucoup d’activités connexes tournent autour de la pêche. On note la présence des menuisiers métalliques qui fabriquent les cages en fer pour capturer les poulpes, les peintres qui décorent les pirogues, les charretiers qui vendent de l’eau et transportent le poisson et les camions frigorifiques pour transporter les produits d’une localité à une autre. A côte de ça, il y a des vendeuses d’eau fraîche, de cacahuètes, des restauratrices, les tenants de boutiques, c’est toutes ces activités qui gravitent autour de la pêche.

Craintes pour l’Aire Marine Protégée

Aujourd’hui l’AMP (Aire Marine protégée) Sangomar est la plus grande et elle fait environ 87 000 hectares. Elle est à cheval sur deux communes notamment la commune de Dionwar situé dans le département de Foundiougne et la commune de Palmarin dans le département de Fatick. 

Capitaine Cheikh Amadou Diallo, conservateur de l’Aire marine protégée de Sangomar souligne : « C’est une AMP quand même très riche en termes de biodiversité aussi bien animal que végétale. Par exemple pour la biodiversité animale on rencontre tout ce qui est oiseaux, les tortures marines, les singes, les baleines, les dauphins et énormément d’autres espèces de poissons notamment les sardinelles aussi et pleins d’autres d’espèces de qui valeurs qui sont rencontrés comme les thiofs au niveau de la zone. En plus de ça en termes d’écosystème, il y a l’écosystème mangrove qui joue un rôle fondamental dans la reproduction des espèces de poissons ».

Aujourd’hui avec le pétrole, les populations nourrissent des craintes pour l’aire maritime protégée.

« Sans nul doute, il y a une crainte qui est exprimée par les communautés dès l’instant qu’on a entendu la découverte, exploration, exploitation du pétrole en termes de perspectives au niveau de Sangomar. Ce qu’il faut savoir l’exploitation quand même elle est en pleine mer environ plus de 80 km des villages. Mais, néanmoins il y a des craintes quand même. Mais les gens ont tendance à vouloir dire que toutes les mesures sont prises pour sécuriser les écosystèmes pour sécuriser les populations, pour sécuriser donc les systèmes de production au niveau du delta du Saloum.  Dans le cadre des rencontres qu’on a avec les autorités, même les sociétés qui ont en charge l’exploitation, ils assurent juste, Woodside, Sub -Seeven, ils ont assuré la garantie, ils ont pris toutes les dispositions nécessaires pour parer à ces éventualités-là », dira le conservateur de l’AMP, Capitaine Cheikh Amadou Diallo.

Accélération de l’érosion côtière

Aussi bien à Djiffère, Dionwar et Niodior, l’érosion côtière est une réalité que les populations de ces localités vivent au quotidien. Certaines populations assimilent les causes aux changements climatiques, d’autres évoquent la présence du pétrole avec l’implantation de Woodside en mer pour l’exploitation du pétrole.

« L’exploitation du pétrole souvent on en parle. Mais, nous commençons à voir les impacts. Parce que dans ce village, il était très rare de voir l’avancée de la mer, le constater tel que nous l’avons constaté l’année dernière, parce que la mer a avancé plus de 300 mètres.  Elle a emporté beaucoup de maison et on pense que c’est l’implantation de Woodside Energy en haute mer. Ce sont les conséquences de cette implantation », souligne M. Pape Ousmane Samb, enseignant à l’école élémentaire de Djiffère, président du club environnement mangrove.

Et M. Samb de poursuivre : « Vous savez Djiffère est un village de pêche, toutes les couches ont été bien représentées. Vous venez à Djiffère, vous trouverez toutes les ethnies même les étrangers. Il y a l’avancée de la mer. Si nous pouvions avoir des actions au niveau de la mer par exemple des digues de protection pour protéger la commune de Palmarin et la commune de Dionwar. Dionwar aussi a connu est avancée de la mer ».

Quant à M. Moussa Kaïré, mareyeur à Djiffère, il témoigne : « Nous pointons du doigt l’exploitation du pétrole concernant l’érosion côtière. Actuellement notre plage est menacée par l’érosion côtière, beaucoup de maisons sont détruites sans l’intervention de l’Etat. La mer a tout ravagé. Je ne vois même pas les agents de Woodside pour nous aider à construire une digue de protection ».

Pape Dione, pêcheur à Djiffère, affirme : « Le quai de pêche de Djiffère est menacé par la mer et l’Etat ne fait rien. Cette érosion côtière est due en partie de l’installation de la plateforme ici ».

Mor Lô, pêcheur à Djiffère, explique que : « Pour le moment, le pétrole est exploité en haute mer, nous ne sentons pas les conséquences. Cependant, nous connaissons une érosion côtière sans répit. Nous risquons de perdre toutes les maisons aux alentours de la mer. Cependant, ils mettent dans la mer des produits qui tuent les poissons. Ce produit n’épargne pas les fruits de mer, c’est une véritable menace pour la pêche ».

Cherif Diakhaté dit « Zeum » dénonce : « Je pense que l’érosion côtière est due aux changements climatiques et à l’implantation de la plateforme qui a accéléré l’érosion côtière ».

Abdou Ndiaye, pêcheur à Dionwar se désole : « Aujourd’hui, nous assistons à une érosion maritime qui a ravagé beaucoup de maisons. Entre Sangomar et Djiffère, la mer est en trainfractionner Sangomar en l’amenant du côté de Betenty. Cette situation constitue une menace pour Dionwar ».

Une peur de perdre l’activité de pêche et les activités connexes soulevées

Dans les îles de Djiffère, Dionwar et Niodior, les pêcheurs, les tenants d’activités connexes, tous les acteurs qui gravitent autour de la pêche, craignent avec l’exploitation du pétrole une disparition de l’activité de pêche avec toutes les autres activités qui en dépendent.

Trouvé dans l’enceinte de l’école élémentaire de Djiffère dont le mur et la classe située du côté de la plage commencent à subir les assauts des vagues, M. Pape Ousmane Samb, enseignant et en même temps pêcheur, nous parle des craintes sur l’activité de pêche et les conséquences que la disparition de l’activité pourrait avoir sur l’économie sénégalaise.

M. Pape Ousmane Samb, président du club environnement mangrove de Djiffère, souligne : « Nous craignons pour l’activité des pêches parce que vous savez si tout ce que nous venons d’énumérer se passe, l’activité risque de connaître vraiment des impacts négatifs. Et quand la pêche ne va plus, imaginez-vous les conséquences qui font en suivre à savoir l’activité des femmes transformatrices va connaître un problème. Il y a beaucoup de personnes qui s’activent au niveau de la pêche. Paracerque quand on parle de pêche, il y le transport du poisson, il y a place pour la conservation des poissons, mais il y a beaucoup de personnes qui ont des activités à Djiffère c’est grâce à la pêche. Les charretiers, ceux qui font la manutention, ceux qui font la relation entre les pêcheurs et les Mareyeurs, il y a des gens qui achètent des poissons au niveau des pêcheurs pour les revendre aux Mareyeurs (c’est ceux-là qu’on appelle les lague- lague ») ». 

Il poursuit : « Il peut y avoir des conséquences sur la mangrove. S’il n’y a plus de mangrove, la pêche risque de disparaitre dans le coin, parce que la mangrove participe énormément dans la pêche à savoir au niveau des poissons.  Pourquoi ? Parce que les poissons viennent dans la mangrove pour se reproduire. La mangrove en quelques sortes c’est un lieu de reproduction des poissons, c’est un lieu où les petits poissons peuvent se cacher jusqu’à la maturation. C’est pourquoi si nous perdons la mangrove, nous risquons de perdre la pêche dans la région de Fatick en quelques sortes, ce qui fait une grande partie de la pêche au Sénégal risque de disparaitre à cause du pétrole ».

Mamadou Faye, pêcheur à Dionwar souligne : « Nous avons peur pour l’avenir de la pêche à Dionwar avec la présence du pétrole. Notre seule source de revenus, c’est la mer et le pétrole menace aujourd’hui notre activité. Depuis l’arrivée du bateau qui doit extraire le pétrole, les poissons fuient notre localité ».

Mme Fatou Sarr, responsable du groupement « Niamane » de 700 femmes, étale ses craintes en disant : « Le pétrole va impacter notre activité. Nous avons peur que le pétrole détruit notre activité qui est notre gagne-pain. Il y a des gens qui étaient venus nous parler du pétrole. Tout peut arriver, ils peuvent aller jusqu’à dire qu’il faut qu’on déplace les populations de Dionwar car on a trouvé du pétrole sur les lieux ».

Présence en mer d’un liquide toxique tuant les poissons

Les pêcheurs à l’unanime révèlent la présence en mer d’un liquide qui tue les poissons.

Mamadou Faye, pêcheur à Dionwar, témoigne : « Ici au niveau de Dionwar, nous avons constaté la présence d’un liquide en mer et ça tue les poissons. Jusqu’à présent, nous ignorons ce genre de liquide. Avec la présence de ce liquide, le poisson se fait rare. Nous pensons que le liquide échappe du lieu où le pétrole est exploité. La présence de pétrole ne rime pas avec ressources halieutiques. Le pétrole détruit la mer et tue les ressources halieutiques. Peut-être le pétrole, c’est bon pour le développement du pays mais forcément, ça nuit l’activité de pêche ».

Quant à Limamou Bâ, pêcheur à Djiffère, il avance : « Le pétrole a commencé à impacter notre activité. Nous notons la présence d’une eau rougeâtre qui tue les poissons. Avec la présence de cette eau, les poissons pourrissent vite. Pour nous, cette mauvaise eau provient des installations en pleine mer ».

Cherif Diakhaté dit « Zeum », pêcheur à Djiffère abonde dans le même sens, il témoigne : « Le pétrole nous a causé beaucoup de dommages. Il faut signaler qu’il y a un liquide de très mauvaise odeur, qui tue les poissons et éloigne les autres types de poissons. Même, nousen tant que pêcheur, nous sommes en danger, nous portons des masques pour ne pas respirer l’odeur. Je pense que cela échappe de la plateforme ».

Sidy Ndour confirme les autres pêcheurs, il avance : « Des produits échappant des installations tuent les poissons. L’exploitation du pétrole détruit l’activité de pêche. Il y a un liquide de très mauvaise odeur en mer et cela porte atteinte à notre activité. Nous ne savons pas, c’est quel genre de liquide ».

Abdou Ndiaye de Dionwar se dit convaincu que : « Nous sommes convaincus que c’est le liquide qui échappe de cette zone d’exploitation qui tue les poissons. Il faut que les autorités prélèvent ce liquide qu’elles analysent en laboratoire pour éclairer notre lanterne ».

Rareté des ressources halieutiques

Aujourd’hui les acteurs de la pêche assimilent la rareté des ressources avec l’exploitation du pétrole à Sangomar.

« Les pêcheurs qui vont en mer quotidiennement nous disent que les poissons se vont de plus en plus rare, et nous pensons que c’est aussi l’effet de cette implantation », note Pape Samb.

Mor Gueye, président des mareyeurs industriels : « Aujourd’hui, nous assistons à une raréfaction des ressources halieutiques. Les quantités de capture ont diminué. Nous craignons pour la pêche avec l’exploitation du pétrole. Nous n’avons pas de poissons, tous les camions frigorifiques sont garés du fait du manque de poisson. Depuis l’annonce du pétrole, notre chiffre d’affaires a baissé. Dans notre zone, certaines espèces sont en voie de disparition. Nous ne pouvons plus avoir les quantités de poulpes, seiche que nous avions avant ».

Mamadou Sarr, pêcheur à Niodior abonde dans le même sens en affirmant : « Nous craignons pour notre activité parce qu’on ne peut plus avoir des huitres et autres produits que les femmes ramassent dans les mangroves. Nous assistons à une raréfaction des ressources halieutiques dans la zone. Les pirogues sont interdites dans la zone près de l’implantation de la plateforme ».

Un autre pêcheur de témoigner : « On nous demande de tenir une distance de 500 mètres par rapport au bateau en mer parce qu’il y a des câbles de courant. J’ai aperçu le bateau, il y avait beaucoup de lumières dans la plateforme. La lumière attire les poissons dans la plateforme et nous sommes interdits d’aller là-bas, cela pose problème. La plateforme attire les poissons à cause de la lumière. Les poissons vont converger vers la plateforme et nous n’avons pas le droit de pêcher aux abords. Rien qu’avec ça, nous n’arriverons plus à avoir du poisson dans la zone où nous pêchons, c’est ce qui a entraîné la rareté des ressources au niveau Niodior ».

« Actuellement, il n’est plus possible d’avoir 50 caisses de « Yaboye », nous commençons à subir les conséquences de la présence du pétrole dans notre zone », dira un autre pêcheur.

Même son de cloche pour Pape Dione qui affirme : « L’exploitation du pétrole peut impacter la pêche car déjà, les poissons se font rare. Le pétrole et le poisson ne font pas bon ménage ».

Comme ses collègues pêcheurs, Sidy Ndour souligne : « Djiffère est une zone très poissonneuse. Presque que toutes les espèces en voie de disparition, on peut les retrouver à Djiffère. C’est une zone carrefour surtout en matière de pêche. Cependant avec l’arrivée du pétrole, les choses se dégradent et les poissons se font de plus en plus rare ».

Quant à Mme Fatou Sarr, responsable, fédération FELOSI (Dionwar), groupement « Niamane » de 700 femmes, elle avance : « Les pêcheurs vont en mer et reviennent bredouille. Actuellement, le pétrole arrive et cela va augmenter nos difficultés surtout nous, les habitants faisant face à Sangomar. Avant, on partait en mer et on revenait avec beaucoup de produits halieutiques mais avec le pétrole, les choses ne seront plus comme avant ».

« Nous pouvons faire des jours en mer sans avoir d’importantes captures. Les quantités de poissons ont diminué dans notre zone. C’est dans la zone d’exploitation du pétrole où on doit pêcher le poulpe », dira Abdou Ndiaye, pêcheur à Dionwar.

Woodside et ITIE pointés du doigt !

Les pêcheurs estiment que Woodside n’a rien fait pour eux. Ils estiment qu’ils n’ont reçu aucune aide de la compagnie. Pour certains pêcheurs, ils ont une seule fois rencontré les gens de WOODSIDE dans le cadre de la sensibilisation de la présence du bateau qui doit exploiter le pétrole. D’autres pêcheurs par compte, affirment qu’ils n’ont jamais rencontré les agents de WOODSIDE. Même l’ITIE n’est pas épargnée, certaines voix soulignent que les chiffres qu’elle avance concernant les investissements de WOODSIDE dans la région de Fatick, ne reflètent pas la réalité.

« Au début, les agents de WOODSIDE ont distribué des flyers pour nous dire que le bateau est arrivé en mer et bientôt, l’exploitation va démarrer. Ils disent à travers ces flyers que les pêcheurs qui partent en mer doivent s’éloigner de 500 mètres le bateau. Depuis lors, les populations n’ont reçu aucune information concernant le pétrole », note Mor Gueye.

M. Pape Ousmane Samb, président du club environnement mangrove de Djiffère, souligne : « A ma connaissance, je n’ai pas encore vu des actions que Woodside a fait dans le coin. 

Il une société appelée Sub- Seeven qui a donné des kits à l’école par le biais Wheatland- international. C’est Wheatland- international qui a diligenté ces kits là au mois de novembre. Chaque élève avait un sac avec beaucoup de cahiers et du matériel dont l’élève a besoin ».

Il poursuit : « Donc nous appelons Woodside Energy à faire des actions de protection de l’aire maritime protégée. Nous appelons WOODSIDE pour qu’elle nous aide au niveau de l’avancée de la mer, mais aussi qu’elle accompagne les acteurs dans le cadre de la formation. Au niveau des infrastructures : vous avez vu notre école. Il y a que deux bâtiments qui répondent, 5 abris provisoires. Nous l’attendons aussi pour un poste de santé ».

« Woodside nous a donnés des dépliants pour sensibiliser sur le bateau qui doit exploiter le pétrole. Dans ces dépliants, il est écrit que les pêcheurs ne doivent s’aventurer dans les alentours du bateau et c’est interdit de mener des activités de pêche. Nous n’avons reçu aucune aide de leur part », dixit le pêcheur Mor Lô.

Quant à Abdou Ndiaye, pêcheur à Dionwar, souligne : « Woodside qui exploite le pétrole, doit aider les pêcheurs avec de l’équipement et des financements pour d’autres activités génératrices de revenus ».

Concernant les investissements de Woodside dans la région de Fatick, certains acteurs estiment que les chiffres avancés par l’ITIE ne reflètent pas la réalité.

« En ce qui concerne le pétrole, on a reçu des informations fermes de la part du gouverneur, ITIE est passée à Fatick avec Mme Eva Marie Coll Seck. Ils ont donné leur tableau en disant que les pétroliers et Woodside ont investi à Fatick, ils ont fait telle et telle chose et au niveau de la localité, personne n’est au courant, ni le gouverneur, ni les sous-préfets. Personne ne peut valider ça. C’est ainsi, qu’on a décidé, si une opération devait avoir lieu, quel que soit la personne ou l’entreprise, qu’elle s’adresse d’abord au gouverneur pour qu’on sache réellement ce qu’il y a. Des gens font des communications pour dire qu’on a injecté une telle somme dans la population, ou bien on a investi une telle somme dans le cadre de la RSE, ou bien dans le cadre de la sensibilisation et personne n’est au courant », précise une source proche de l’administration .

Et notre source de poursuivre : « Ce sont des études que Woodside a commanditées et elle va comptabiliser ça en disant qu’ils ont injecté tant d’argent. Personne ici n’a ressenti les chiffres qu’on avance avoir été investis par Woodside au profit des populations. Le gouverneur représente le président de la Republique dans la région, il doit être au courant de tout mais les gens donnent des chiffres et l’ITIE les valide sans les concernés ne soient au courant. L’ITIE fait des journées de partage pour dire qu’on a injecté tant de millions ou milliards dans la région de Fatick alors que personne n’a rien vu ».

Notre source précise que ces réalisations que l’ITIE déclare, ne sont pas portées au niveau de l’administration, personne ne peut valider ces réalisations.

« Durant la journée de partage initiée par l’ITIE après leur présentation sur les investissements par Woodside dans la région, tout le monde était ébahi en disant, toute cette manne financière est investie dans la région sans que personne ne soit au courant et que les populations ne ressentent pas ça », conclut notre source.

ENTRETIEN

MBACKE SECK, PRESIDENT DU CODE ECOLOGIQUE SUR L’EXPLOITATION DU PETROLE

« C’est une grande menace pour l’environnement et pour les activités de la pêche »

M. Mbacké Seck, Président de l’organisation dénommée « Code écologique », dans l’entretien est largement revenu sur les conséquences de l’exploitation du pétrole sur les activités de pêche. Il a soulevé des craintes liées aux problèmes écologiques de la pêche et des activités connexes. Selon lui l’exploitation constitue une grande menace sur l’environnement et les activités de pêche. Selon M. Seck, l’exploration et l’exploitation du pétrole sont sources de pollution sonore, de pollution physique. Il estime qu’on devait faire une large concertation surtout avec les pêcheurs pour leur expliquer les risques encourus.

Quelles sont les conséquences que l’exploitation du pétrole peuvent avoir sur les activités de pêche ?

Au Sénégal, ces trois dernières années, nous sommes réjouis de la découverte du pétrole et du gaz qui en termes d’espoir, a fait même la promotion de la loi Constitutionnelle pour dire que toutes les ressources naturelles appartiennent au peuple. Cela voudrait dire qu’il y a un réel espoir d’enrichissement pour améliorer le bien-être des populations. Mais, il faut que tout ceci se passe dans la transparence. Mais au même moment, nous avons des craintes liées aux problèmes écologiques de la pêche et des activités connexes. Ce que nous déplorons aussi bien à Saint-Louis que sur le puit Yakar Teranga au large de Cayar et à Sangomar ainsi le puit Offshore profond. Donc, c’est une grande menace pour l’environnement et pour les activités de la pêche. Nous avons 700 km de côtes. Nous n’avons pas une différence de 100km entre les zones de recherches et les plateformes proprement dites. Pour Saint-Louis, l’usine de liquéfaction du gaz naturel est installée à Diattara, c’est la zone de pêche des saint-louisiens. Donc, on ne peut pas nous dire qu’il n’y a pas d’impact sur la pêche. La fosse de Cayar est une des zones de reproduction, par moment de l’année, c’est la zone la plus poissonneuse du Sénégal. Lorsque vous avez Yakar Téranga dans cette zone, à coup sûr, vous avez des conséquences sur la pêche.

Peut-on redouter des menaces sur les ressources halieutiques ?

Depuis 2 ans maintenant, nous avons les grands cétacés, les dauphins, les baleines qui échouent sur la place et de la grande côte et de la petite côte. Il y a un mois, en début de juin, nous avions une bande de dauphins qui avait échoué du nord de Malika, nous avons eu les baleines de Yoff, nous avons une baleine sur la Baie de Hann, nous avons une baleine à Rufisque. Donc tous les trois mois, nous avons les grands cétacés qui sont désorientés par tous ces bruits qui sont nouveautés dans les mers du Sénégal. Donc l’exploration et l’exploitation sont sources de pollution sonore, de pollution physique, parce qu’on va sortit des éléments échoués. Et le Sénégal va passer sur le plan environnemental de pays à très faible production de gaz à effet de serre, à grand producteur de gaz à effet de serre. Donc, tous nos engagements sur la CDN (la contribution nationale déterminée) sont aujourd’hui remis en question par l’exploitation du gaz et du pétrole.

Sur la pêche, nous avons plusieurs AMP (Aire marine protégée). Le gouvernement de la République a créé plusieurs AMP en 2020 : Nous avons l’AMP de Saint-Louis, nous avons l’AMP de Kayar, nous avons l’AMP de Gorée, nous avons l’AMP de Joal et nous avons l’AMP de Gandoul dans les îles du Saloum. Et nous avons plusieurs parcs, les réserves de biosphère dans les zones qui font l’objet de recherche aux exploitations du pétrole et de gaz. Or, l’objectif des AMP au niveau de la pêche, c’est d’avoir plus de poissons plus gros, des poissons plus diversifiés, plus d’espèces, et par conséquent plus de ressources pour les pécheurs et plus de protéines pour notre sécurité alimentaire. Donc aujourd’hui, est-ce que les recherches que nous avons tirées de l’exploitation du pétrole et du gaz à savoir un peu plus de 800 milliards de francs CFA, valent la peine de remettre en question notre pêche qui est déjà très vulnérable au changement climatique, très vulnérable à la surpêche ?

 Quelles sont les précautions à prendre pour éviter les catastrophes écologiques en mer ?

Ce que nous préconisons, c’est ce que dit la loi au Sénégal. D’abord, maintenir la concertation entre les différents acteurs. Parce que même la Constitution au point 25. 1 dit clairement que les ressources naturelles appartiennent au peuple. Mais, elles doivent être gérées dans la transparence pour le bien-être des populations. Est-ce que tous les risques en termes de pollution, de perturbation de nos côtes sont tenus en compte, est-ce que tous les acteurs sont informés correctement ? Parce que pour GTA, les consultations des populations ne sont pas à la hauteur des risques encourus. Ils ont consulté très peu de population cible. Or, ce qui était normal, c’est de faire une grosse consultation pour que l’ensemble des personnes qui sont intéressées sur ça, puissent donner leur point de vue, que les pêcheurs soient carrément impliqués, que les acteurs écologiques soient consultés, que les acteurs des différentes aires marines concernées soient réellement consultés. Et surtout que les dispositions du code de l’environnement soient respectées. Nous avons tellement de manquement par rapport au pétrole et au gaz que le nouveau code de l’environnement en chantier est obligé de tenir compte de cette réalité.  

   

Quels sont les avantages et les inconvénients de l’exploitation du pétrole ne mer ?

L’exploitation du pétrole et du gaz va donner davantage d’opportunités au Sénégal en termes d’accroissement de la production d’énergétique en électricité. Parce qu’on a une population qui a une demande croissante, on a une industrie en demande croissante. On va remplacer des énergies très polluantes du gaz. On ne va plus importer du charbon. Les centrales à électriques vont de plus en plus utiliser le gaz sénégalais. Et nous aurons davantage les transports qui vont utiliser de l’énergie électrique. Ça, c’est extrêmement important. Et nous aurons des ressources qui nous permettront d’investir en matière de formation, en matière de santé. Mais nous allons accroître l’empreinte carbone de notre pays, nous allons produire davantage de gaz à effet de serre. Et le gaz à effet de serre produit le changement climatique. Et nous allons rendre plus vulnérables nos côtes, vulnérables à l’avancée de la mer, vulnérables aux inondations, vulnérables à la sécheresse, mais davantage vulnérables dans notre alimentation avec une mer sans ressources halieutiques, mais avec une agriculture victime de changement climatique.